Détone de silence

Détone de silence
Installation sonore in situ pour un panneau de tôles vissées et quatre excitateurs audio, in Exposition collective « Penser les possibles », commissariat Mehryl Levisse, Balak #12, Usine de la Macérienne, Charleville-Mézières

Absalon – Michel Blazy – Mircea Cantor – Ali Cherri – Hassan Darsi – Fischli & Weiss – Julie Faure-Brac – Clarisse Hahn – Balthazar Heisch – Mehryl Levisse – Paul Maheke – Maria Marshall – Tania Mouraud – Jérémie Nicolas

HYMN1 (extrait)

HYMN2 (extrait)

HYMN3 (extrait)

Détone de silence est une installation sonore pour quatre excitateurs audio et un panneau de tôles vissées, créée in situ dans le grand atelier de l’ancienne usine de la Macérienne de Charleville-Mézières, à l’occasion de l’exposition Penser les possibles.

Le -dé qui ouvre le verbe détoner ne marque pas un privatif mais opère comme un composé intensif. Détoner ne signifie pas le retrait du ton, mais son amplification à tel point qu’il déborde et s’excède avant de nécessairement s’interrompre. Que cela arrive par le silence aggrave une ambiguïté qui peut s’entendre ici trois fois différemment.

D’abord, dit à l’oral, on entend « des tonnes de silences ». Cela renvoie à un procédé de création qui consiste à amplifier le silence d’un lieu pour en faire une sonorité de composition proche du bruit blanc, à partir de laquelle tout, a priori, pourrait de nouveau être formé. Ce titre qualifie également deux types d’événements éclairant la question d’une écoute par écho, c’est-à-dire tendue vers un potentiel audible sans source directement donnée.

Chacun alimentant l’idée d’une surprise due à la silenciation d’une source, ces événements consistent d’une part en un manque et de l’autre en un excès : des bruits de fond montent lentement en intensité et s’arrêtent net au seuil de leur audibilité, et des résonances excitent les tôles et font brusquement sonner de brèves intonations saturées. Dans le premier cas la disparition d’un bruit de fond ayant progressé imperceptiblement peut produire (selon où l’auditrice se trouve dans l’espace) un phénomène d’accentuation de l’écoute où c’est l’interruption d’un bruit de fond qui amplifie sa présence et non le bruit de fond qui est amplifié. Dans le second, l’excitation particulière des zones de recouvrement des feuilles du panneau génère un effet de trompette hurlante et cette incidence de timbre recouvre la source alors inaudible en tant que telle.

Ces trois manières d’entendre différemment que ça Détone de silence convergent vers une même question, celle de l’écoute musicale, ou plutôt d’un musical possible pour l’écoute. Car si la musique est un art temporel non représentationnel, l’écoute est elle toujours médiée par un minimum de représentation, à tel point que l’on pourrait dire qu’il ne peut y avoir à proprement parler d’écoute musicale. Quelle forme alors le musical peut-il prendre pour l’écoute ? Le petit cri sans voix qui accompagne toute surprise, par exemple celle d’une source silenciée, qui manque ou s’excède, est-il un bruit susceptible d’intéresser le musical ?

https://lamacerienne.com/faceb/le-lieu/
https://www.espacebalak.org/